Accueil A la une Le littoral du Cap bon menacé par… le concentré de tomates : Halte aux rejets non traités !

Le littoral du Cap bon menacé par… le concentré de tomates : Halte aux rejets non traités !

Oui ! Ça suffit ! Nos plages ont assez subi les revers fâcheux de l’industrie et aussi des rejets d’eaux ménagères sanitaires polluées. Après le scandaleux massacre écologique de nos cités balnéaires des banlieues sud et nord de Tunis, voilà que l’«ogre» de la pollution environnementale rampe aveuglément vers le Cap Bon, pour menacer ses plages, comptant parmi les plus belles dans notre pays, voire dans le bassin de la Méditerranée. Pas moins de onze unités d’industrie de transformation de tomate ne cessent, à ce jour, d’assommer l’environnement (plages et air) par leurs rejets anarchiques, constituant un danger certain pour l’équilibre écologique, la faune et la flore maritimes. L’Anpe veille au grain certes. Mais elle ne dispose pas, hélas, de solutions miracles. Son représentant nous en parle… expertement.

Après la retentissante affaire de la lagune de Tazarka ayant scandalisé la population de céans et mis le feu aux trousses des officiels es-qualités (voir notre dernier article y afférent du 3 août 2019, intitulé «Adieu ! les oiseaux d’eau !»), voilà que la société civile  de Soliman, Korba, Kélibia, El Haouaria, Dar Allouche, El Mida, etc. s’inquiète et s’agite au sujet  des rejets polluants, effectués en pleine nature par les unités de transformation de tomate, installées dans ces cités balnéaires.

L’Onas à l’index ? Incroyable !

Les habitants concernés craignent fort que, au fil du temps, ces rejets anarchiques ne mettent en péril l’écosystème, la faune et la flore maritimes. Pis encore, les intéressés, ayant mille et une raisons d’être jaloux de leurs splendides plages, sont gagnés par une colère noire en apprenant que l’Onas même ne se serait pas empêché d’effectuer occasionnellement des rejets d’eaux, partiellement traitées par ses stations. Ce qui serait à la fois incompréhensible et inadmissible de la part d’un organisme directement placé sous la tutelle de «messieurs-dames environnement».

Le lassant parcours du combattant !

Après avoir longtemps tourné en rond et frappé à toutes les portes et même les fenêtres de l’Agence nationale de protection de l’environnement (Anpe), à commencer bien sûr par celle de la cellule de la communication, l’on n’a pu «happer» le moindre élément d’information au sujet de ce dossier si brûlant. Le poste de directeur général étant demeuré vacant pendant pas moins de deux mois. Il nous a donc fallu attendre le débarquement de M. Mohamed Bouden, ex-gouverneur de Mahdia, pour que notre droit d’accès à l’information (provisoirement gelé) fut prestement accordé… Ce qui mérite d’être évidemment salué.

Voilà enfin que le navrant parcours du combattant nous met nez à nez avec un brave monsieur, hautement qualifié pour nous livrer la vraie vérité sur la scandaleuse problématique et nous faire un zoom exhaustif sur l’état des lieux.

Le Cap Bon, la part du lion

M. Mohamed Arbi Filali, expert contrôleur général au sein de l’Anpe, c’est de lui qu’il s’agit, commence par nous informer que le gros de l’industrie de transformation de tomate (avec un taux de 60%) est installé sur le littoral du Cap Bon. La répartition géographique de ce réseau se présente comme suit : une unité industrielle à Soliman, une à Grombalia, quatre  à Korba, une à Kélibia, une à El Haouaria, trois  à Dar Allouche et deux  à El Mida. Le total se chiffre à treize unités.

Le reste des unités industrielles de tomate est implanté dans les régions de Kairouan, Sidi Bouzid, Mateur, Béja et Tébourba.

L’ensemble du réseau du pays travaille sur le concentré de tomate pendant une moyenne de 45 jours par an (du 1er août au 15 septembre). Le reste du temps, les activités de ce réseau s’orientent vers l’harissa et les confitures, basées sur diverses catégories de fruits.

En dehors des tomates, tous les produits conservés sont à l’origine de rejets presque insignifiants. Puisque leur traitement ne nécessite pas de grosses quantités d’eau, se frayant un chemin vers la nature, au bout de la chaîne. Sachant qu’un seul kilogramme de tomates fraîches à traiter a besoin d’un volume d’eau allant de deux à cinq litres! Ce qui n’est pas sans poser problème.

La vérité amère confirmée !

Quant à la question essentielle de savoir si réellement les rejets du réseau du Cap Bon sont effectués en pleine nature sans traitement, pour échouer dans le littoral, M. Mohamed Arbi Filali n’a pas hésité à nous le confirmer avec moult regrets. Nous précisant que la majeure partie des unités industrielles en question ne sont pas suffisamment outillées pour le traitement. Des fois, l’on y rencontre des stations de traitement, hors service, existantes tout juste pour meubler le décor.

Au cas où les efforts de persuasion s’avéreraient peu concluants, les contrôleurs de l’Anpe ne tarderaient pas à recourir à la dissuasion et aux mesures coercitives, à l’encontre des auteurs de rejets non conformes aux normes. Ceci en vertu de la législation en vigueur en la matière.

Des PV ? Et puis après ?

Dans cet ordre d’idées, notre interlocuteur nous confie que, lors de la saison de tomates écoulée (2018), plusieurs PV ont été dressés contre des industriels du Cap Bon. Ceux-ci, ayant fait, du coup, l’objet d’amendes allant de cent à trente mille dinars. Pour la saison en cours, le bilan n’est pas encore disponible. L’on nous précise, en outre, que, dans les cas limites et extrêmes, les sanctions peuvent aller jusqu’à la fermeture pure et simple des unités contrevenantes aussi longtemps que celles-ci continueraient à déverser des rejets considérés gravement polluants.

La faune et la flore en prennent un coup !

Concernant les revers fâcheux de tels rejets sur l’environnement, particulièrement maritime, il nous a été donné d’apprendre que ce phénomène est propre à créer des milieux asphyxiés. Ces rejets, toujours chargés de matières organiques, ne manquent pas de porter un coup dur à la fois à la faune et à la flore maritimes. Ceci, à travers la prolifération d’algues qui est inévitablement à l’origine du déficit d’oxygène dissout dans l’eau maritime au niveau du littoral touché.

Ces milieux asphyxiés, c’est-à-dire, accusant un grave déficit d’oxygène, constituent une fâcheuse menace pour nos richesses halieutiques. Les poissons exposés ainsi au danger d’étouffement, ou bien périssent ou bien fuient le littoral endommagé pour élire refuge dans des milieux sains, ailleurs, dans les profondeurs et parfois en dehors de nos périmètres maritimes.

Il va sans dire que ce phénomène est de nature à freiner d’une manière considérable le rythme de croissance de nos richesses halieutiques.

L’hôte de nos colonnes finit expertement par nous rassurer que la situation n’est pas encore aussi alarmante qu’on ne le pense. Mais elle risquerait de le devenir si nos industriels ne s’impliquent pas avec conviction au plus tôt dans une logique écologique, ménageant la chèvre et le chou.

Le rôle économique et social des intéressés ne devrait pas leur faire oublier leur devoir et leurs responsabilités primordiaux et vitaux vis-à-vis de l’espace géographique et environnemental qui les accueille.

Convertir le mal en bienfaits

Interrogé sur le coût approximatif d’une station de traitement, M. Filali nous avance une valeur variant entre un milliard et un milliard et demi de millimes. Ce qui représente le montant de plus ou moins cent millimes comme frais de traitement pour une boîte d’un kilogramme de concentré de tomate.

Cela dit, notre interlocuteur a tenu à nous avancer une formule de traitement beaucoup moins onéreuse. Elle consiste à ériger une seule station de traitement pour un collectif d’unités situées dans une même zone. Il vise par là Korba, Dar  Allouche et El Mida, qui abritent respectivement quatre, trois et deux unités. De cette façon, le coût du traitement serait réduit environ de 50%. Ceci sans compter que les rejets toxiques seraient convertis en rejets bénéfiques. Puisque les rejets traités pourraient être exploités pour l’irrigation des champs agricoles. De surcroît, les zones humides (lagunes de Tazarka et Korba) pourraient être alimentées par ces eaux saines en périodes de sécheresse. Ce qui y consoliderait l’équilibre écologique aux «bon mauvais» moments.

Il n’y a pas encore le feu…

Au final, il est à espérer que nos décideurs en la matière feront preuve de plus de vigilance et plus de détermination pour endiguer ce fléau avant qu’il ne soit tard, comme cela a été le cas pour d’autres littoraux, nous ayant tant donné du pincement au cœur et des crampes d’estomac…

Il n’y a pas certes le feu, pour le moment. Mais l’on ne devrait pas attendre que les «flammes» nous envahissent pour mettre les «pompiers» devant une mission impossible !

L’on gagnerait alors, sans plus tarder à concrétiser la formule des stations collectives, pour leurs bienfaits incommensurables, confirmés par notre expert, attentivement écouté. Ceci, tout en songeant à mettre le paquet et miser sur le Fonds de Dépollution réservé par l’Etat pour soutenir financièrement (à titre de don et à concurrence de 20% des frais globaux de dépollution) les industriels mis à l’index et les encourager à se faire doter de stations de traitement, conformes aux normes requises. Sachant que de telles installations nécessitent des investissements faramineux, reconnus au-dessus des moyens propres des intéressés.

Pour finir, question : pourquoi nos décideurs si jaloux et si soucieux — autant que tous — de la qualité de l’air, de la mer et de la terre n’ont-ils pas songé à résoudre ce problème si complexe en amont au lieu de se laisser faire assommer par ce casse-tête chinois en aval ?

Ceci en n’accordant l’agrément à tout industriel qu’après la mise en place d’une station de traitement dans les règles de l’art. Evitant ainsi de voir la charrue mise devant le bœuf !

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2 Commentaires

  1. kaabi samir

    16 août 2019 à 11:34

    tout d’abord ,ces unités sont déjà équipées de stations de prétraitement ,donc qu’allons nous faire d’elles ,dautant plus que d’après la loi le pollueur est le payeur c’est à dire l’industriel est responsable de sa pollution.Donc ,l’Etat ne peut pas interferer dans la gestion de ces industries.aussi, il fallait interroger ces indusriels de ce qu’ils pensent et comment ils voient la resolution de leurs problemes .L’ANPE n’a pas à donner des chiffres sur les couts car aucune étude n’a été realisée dans ce sens.Il était judicieux de demander à l’UTICA ces renseignements.

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  2. kaabi samir

    16 août 2019 à 19:08

    j’invite si larbi dérouiche de contacter les organismes spécialisés et mandatés par l’Etat pour repondre aux questions posées :ainsi pour les meilleures technologies disponibles pour le traitement des rejets des conserveries de tomates et autres c’est le CITET,pour l’effet de la polllution sur la côte et les lagunes,la faune et la flore c’est l’APALaussi,je pense que nos industriels ne sont pas dupes pour ne pas recourir à un traitement collectif et moins onéreux si celà peut resoudre leurs problèmes.Et puis ,pour terminer l’absence d’un premier responsable durant deux mois à l’ANPE pour répondre à vos questions je vous invite à revoir les informations et surtout celles qui parlent des problèmes du OUED Dar Allouche et El gharaa (durant le mois de juillet) et vous aurez pu rencontrer les premier responsable de l’ANPE et suivre avec lui les differentes visites et reunion au gouvernerat de Nabeul et à haouria et autres pour resoudre les problèmes de ces conserveries.Mais ,vous étiez absent .

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